Mythique
Certains lieux éveillent en nous des souvenirs oubliés, des émotions et des sentiments indéfinissables.
Lorsque ces sensations sont communes à tous, on dit alors que ces lieux sont « mythiques ».
Pour un musicien, un chanteur, le lieu mythique par excellence est l’Olympia de Paris. A l’époque de Bruno Coquatrix, « passer à l’Olympia » était synonyme de consécration. Même aujourd’hui, où il existe de plus grandes salles de spectacles, où les vedettes jouent dans des stades et qu’il est sommes toutes plus facile de passer à l’Olympia, jouer sur cette scène « mythique » (les Vinyls l’ont fait déjà deux fois) foulée par un si grand nombre de stars reste un sommet dans la vie d’un artiste.
Il existe une autre salle mythique que pourtant bien peu connaissent. Il s’agit de l’Escale de Migennes.
Qui d’ailleurs, à part les Bourguignons, connait Migennes ? Pourtant, à l’époque où les trains étaient tractés par des locomotives à vapeur, la gare de « Laroche-Migennes », située à 150 km de Paris, était une halte obligatoire pour changer les machines et faire le plein d’eau. Cette petite ville était florissante, au point où 3000 employés de la SNCF y travaillaient. C’est là, au bord du canal de Bourgogne, que Michel Wattelier reconstruisit en 1950, le cabaret l’Escale, une première fois détruit par les bombardements de la seconde guerre mondiale. Le premier artiste à y passer fut Gilbert Bécaud. Par la suite, tous les grands noms de la chanson française, Charles Trenet, Jaques Brel (qui y chanta pour la première fois « les bonbons »), Charles Aznavour, Sydney Bechet, Juliette Greco, Jean Ferrat, les Chaussettes Noires et tant d'autres..., prirent l’habitude d’y roder leur spectacle avant de se produire à l’Olympia, de sorte que l’Escale était surnommée « la petite Olympia ».
Avec l’avènement des locomotives électriques, la ville de Migennes retourna progressivement à sa torpeur provinciale et l’Escale tomba en décrépitude, jusqu’en 2004, où la municipalité et l’association AGEM Migennes, nouveaux propriétaires reconstruisirent le cabaret qui aujourd’hui a retrouvé son allant d’antan.
Bien sûr, de nos jours, il ne viendrait pas à l’idée des stars de roder leur spectacle à Migennes et peut-être même que Johnny Hallyday a oublié que c’est là, le 16 avril 1960, qu’il honora à 17 ans son premier contrat professionnel, en première partie du spectacle de Jean Constantin. Pourtant, lorsqu’on pénètre dans cette salle et qu’on y voit les photos des artistes ayant foulé sa scène, on est saisi par quelque chose d’indéfinissable nous obligeant presque à parler à voix basse, comme dans une cathédrale, comme si on ne voulait pas déranger l’âme de ces hôtes illustres.
Le 24 novembre prochain, les Vinyls seront en concert sur la scène de ce mythique cabaret. Avec désormais deux enfants du pays dans leurs rangs, le batteur et fondateur du groupe Jean-Claude Coulonge et le chanteur, Alexandre Lucet, qui joueront « à domicile », il est sûr que les cadres de leurs aïeux vont trembler (d’allégresse) sur leur mur. Nous pouvons nous attendre à un concert mémorable qu’il ne faut rater sous aucun prétexte.
GP